Et si le free floating n’était plus un business aussi juteux ..

black scooter
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Les résultats sont tombés le 3 avril suite au vote, qui a réuni 1,3 million d’électeurs parisiens, les trotinettes en libre service devront disparaitre des trottoirs parisiens d’ici à Septembre. En attendant, 800 employés se retrouvent du jour au lendemain en attente pour leur avenir.

La mairie socialiste de Paris, Anne Hidalgo reconnaissait « « un vrai problème avec le free-floating » notamment en raison des nuisances et de la dangerosité. Malgré tout, certaines actions ont été mises en place par les opérateurs (Lime a notamment embauché des juicers pour collecter et recharger les espaces pour les trotinettes), sans que cela n’ait permis de limiter les nuisances (trotinettes garées sur la chaussée, sur les trottoirs, devant des portes de commerce ou de garage,..).

Cleanrider, presse spécialisée dans le monde du deux-roues électriques a d’ailleurs fait un article en janvier 2023 au sujet du danger que représente les trottinettes électriques à tous les niveaux ; liée aux dégradations de la chaussée ou au manque de prudence des utilisateurs de free floating.

Pour les utilisateurs occasionnels de trotinettes, pour les habitants et travailleurs n’ayant pas une vue quotidienne de ce moyen de transports parisien, l’information apprise sur les médias peut apparaitre brutale tant pour les utilisateurs que pour les opérateurs de ce marché.

Regardons cela de plus près avec un oeil de consultant en veille stratégique !

Est ce que les opérateurs se sont laissés surprendre ?

Quel niveau de surprise pour les trois opérateurs parisiens qui ont vu leur activité interrompu par un référendum à la participation limitée ? Avaient-ils mis en place une stratégie d’Intelligence Economique préalable à cet événement ?

L’intelligence économique est un ensemble d’action, qui permet aux acteurs économiques de maitriser l’information susceptible de faire évoluer leur environnement. Elle leur permet d’anticiper les prises de décision au travers de 3 piliers : la veille stratégique, la protection de l’information et le lobbying.

  • La veille stratégique permet de capter les informations utiles et disponibles à l’extérieur de l’entreprise tant auprès de ses clients, partenaires, fournisseurs que ces concurrents (la fameuse veille concurrentielle). Elle est complémentaire au knowledge management qui repose essentiellement sur la gestion des données internes et sur la valorisation des connaissances.
  • La protection du patrimoine informationnel repose sur toutes les actions, tous les outils et les processus mis en oeuvre pour protéger les données essentielles à l’entreprise, ses savoir-faire, ses compétences, ses ressources. Cela se traduit par des brevets, des clauses de confidentialité, ainsi que par tous les mécanismes de protection informatiques (firewall, antivirus, cryptage des données…) que physiques (barrière à l’entrée, portiques, ….).
  • Le lobbying consiste à utiliser l’information connue, captée par la veille, pour agir sur son environnement et le faire avancer dans une direction qui nous est plus favorable. Souvent connu pour ces enjeux politiques, avec le lobbying européens, et pour ses grands acteurs (lobby pharmaceutique, agroalimentaire, agricole), il cache une notion plus simple : favoriser le rassemblement d’acteurs qui partagent et défendent des intérêts communs.

La veille est une démarche qui doit permettre de détecter au plus vite les signaux faibles et de les intégrer à la stratégie d’entreprise pour éviter des changements brutaux pouvant nuire à notre activité, à notre image, et parfois même à notre pérennité.

Les stratégies mises en place ces dernières semaines ont montré que les opérateurs étaient bien informés de la situation et ont tenté de se réunir pour communiquer leurs intérêts (publicité commune) sans que cela ne soit suffisant, au vu du résultat du vote.

Sur un marché expérimental comme celui du freefloating, il semble évident de rester en permanence en veille, d’anticiper les irritants clients usagers, mais aussi les menaces pouvant émerger d’autres acteurs. Ici les riverains et leur influence dans la pérennité du modèle économique n’a semble-t-il pas été assez mesuré ou les solutions pour y pallier par imaginées ou peu mise en oeuvre.

Ensuite une recommandation, qui est faite aux créateurs d’entreprises,est de se benchmarker (étude comparée). Là encore, un point essentiel qui peut être relevé est que de nombreuses expériences similaires menées dans d’autres villes d’Europe ont été arrêtées également, de façon relativement prématurée.

Sur la base de ces mises en application, certaines villes n’ont même pas attendu une éventuelle expérimentation pour interdire les trotinettes en libre service.

Dessiner sa matrice PESTEL, et PORTER au démarrage du projet est essentiel, en assurer le suivi et la mise à jour sur le long terme est tout aussi vital.

Quid pour la suite ?

Prévoir et anticiper : où l’art du plan B !

Il faut avoir en tête, lorsqu’on se lance en tant qu’entrepreneur, que même si les actions précédemment citées ont été mises en oeuvre (suivi de la réglementation, proximité avec les décideurs politiques, créations de communautés d’usagers pour défendre les bienfaits, partage des actions d’influence) et suffisamment tôt, il apparait parfois que cela reste insuffisant. Les oppositions restent plus fortes, le marché pas suffisamment mature, ou notre solution pas suffisamment aboutie.

Prévoir une sortie d’expérimentation : comment se relancer ? que faire des investissements initiés ? Comment rebondir ?

Au delà du projet « trotinettes en libre services » et de l’impact souvent montré dans les médias pour les usagers, ces opérateurs ont réalisé des investissements matériels, des embauches. Ils ont créé de l’expérience pour leurs usagers, pour leurs collaborateurs et pour leur activité plus largement. Il serait dommage de ne pas capitaliser sur cela.

Cette question est essentielle et nombre de clients d’Advicie le sont devenus ces derniers mois parce que leur activité a été impactée, les investissements réalisés peu rentabilisés, les équipes mises de côté (activité partielle, licenciement, arrêt des embauches, distantielle).

Certaines entreprises convaincues d’avoir trouvé le marché sans faille se reposent sur cette situation de fait. Si certaines structures ont pu bénéficier d’une opportunité unique pour lancer un produit ou un service, rare sont celles qui ont réussi à poursuivre leur activité, à grandir en restant sur cette seule niche de développement. Si diversifier, envisager les pistes de rebond, les nouveaux marchés, les nouvelles offres attendues.

La veille concurrentielle, utile par ailleurs, n’est pas toujours la plus utile pour faire face à ces événements. La coalition concurrentielle était dans le cas précis une réponse intéressante. A contrario, la veille marché (suivre les irritants pour y répondre rapidement) la veille technologique (pour trouver des ressorts innovants, en termes de techniques et de process pour amériorer son produit), la veille réglementaire pas uniquement sur sa zone géographique mais sur d’autres régions pour influer localement en s’inspirant. En cherchant à se benchmarker pour trouver des solutions dans d’autres secteurs ou dans d’autres régions sur leur réponse à la micro-mobilité peut permettre d’identifier de nouvelles méthodes de production ou de distribution du produit et du service.

Se poser la question en permanence de la pertinence de son modèle économique est certainement un facteur clé de succès des entreprises qui se projettent vers l’avenir.

Nul doute que les 3 opérateurs parisiens sauront rebondir, peut être mieux, ici ou ailleurs.

Et vous, êtes vous sûr d’avoir prévu un plan B ?

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